4_tO                         JOURNAL DB HBNRI III.
Antoine, revenant du bois de Vincennes, et n'avoit lors avec lui que deux hommes de cheval et quatre laquais; proposèrent de tuer son cocher et quelques­uns d'autour de lui, et incontinent devoient crier au Roy : « Sire, ce sont les huguenots qui vous veulent « prendre. » A laquelle parole il seroit tellement effrayé qu'il sortirait de son carosse, et lors ils s'en saisiraient et le meneroient bon leur sembleroit; que s'il ne vouloit sortir, ils l'en tireroient de force, et le mene­roient en l'eglise Saint-Antoine, en une petite tour qui est fort près du clocher, en attendant que le commun peuple s'assemblât pour y venir. Mais sur l'exécution de cette entreprise, leur fut remontré par un plus sage qu'eux qu'un roy ne se prenoit pas ainsi, que cela ne se pouvoit faire sans murmure; et quand il se fut faire, qu'il eût fallu avoir un prince de marque pour la conduite : ce qu'ils n'avoient pas, et n'étoient assurez d'être secourus, au cas qu'ils se trouvassent foibles; bref, que telles entreprises étoient trop grandes pour eux, et trop hazardeuses : dont ils demeurèrent tous refroidis, et ne fut exécutée ladite entreprise. Or at-tendoient-ils toujours le duc de Guyse, qui promettoit les venir voir de jour à autre. Mais sur ces entrefaites arriva le duc de Mayenne de son voyage de Guyenne, ou ils disoient qu'il avoit fait de grands faits d'armes contre les hérétiques; et n'étoit aucun bien venu envers la Ligue, s'il ne tenoit ce langage. Etant arrivé à Paris, les principaux de la Ligue le furent trouver à dix heures du soir en l'hôtel de Saint-Denis, il étoit logé, mais en petite compagnie; lui communiquèrent leurs desseins, et comme le duc de Guyse son frere leur avoit promis de les assister et ne les abandonner
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